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Affichage des articles du 2016

halte à la confusion entre "vous" et "je"

Combien d'années d'études brillantes et d'examens difficiles, combien de prodiges d'arrivisme il faut avoir réussis pour se retrouver président ou directeur général d'institution du service public ! On s'étonne d'autant plus des égarements grammaticaux et sémantiques les plus ineptes qui sont avalisés par ces gens admirables, dans les messages émis par les organismes dont ils ont obtenu la responsabilité. L'un de ces égarements connaît une vogue sournoise dont attestent, par exemple, les messages émis par d'innombrables sociétés de service public de premier plan comme la RATP ou les offices de gestion des logements à loyers modérés des villes de Caen, de Paris ou des départements du Rhône ou du Tarn. Les unes comme les autres se sont dotées de dirigeants et de communicants affectant de croire que le pronom personnel convenable pour s'adresser à quelqu'un n'est ni tu (singulier de proximité) ni vous (pluriel de nombre ou de politess

bleu cocu

Aujourd'hui, l'infidélité est jaune. Jaune cocu. Sous Louis XI, en France, elle était bleue : " les bleu-vêtus ", c'étaient les maris trompés. La langue évolue avec liberté, la condition humaine se perpétue avec libertinage... Mais quand un évènement devient un événementiel (sic), et quand de bonnes relations deviennent un bon relationnel (sic), la langue évolue-t-elle ou se dénature-t-elle ? La réponse est dans la question : ici la nature des mots s'altère. Les adjectifs dérivés des substantifs évincent les substantifs eux-mêmes. Ils les font cocus. Sans liberté ni libertinage, hélas, mais dans une vaniteuse surcharge de syllabes. CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE

snobisme et sexisme des alumni

Inquiétante, cette prise de distance croissante des grandes écoles et universités de France vis-à-vis de leur propre langue : non, il n'y a ni pertinence ni légitimité à rebaptiser " alumni " les associations d' anciens élèves d'écoles francophones ni leurs anciens élèves eux-mêmes. Le pluriel du mot latin alumnus (signifiant élève, au masculin) n'est évidemment pas arrivé chez nous par le latin, mais par imitation servile d'un emprunt déjà très ancien des étudiants nord-américains au latin. Notre ré-emprunt est nettement digne des moutons de Panurge, comme en atteste sa propagation aussi soudaine et fulgurante que tardive : les moutons ont le réflexe vif mais l'esprit lent. Nous ferions mieux d'imiter les universités des USA pour leurs extraordinaires fanfares de plusieurs centaines de musiciens. Ces formations artistiques et ludiques persistent à briller par leur absence dans nos universités, où l'apprentissage d'un instrument de

pas de futur après si

Ce que les linguistes appellent joliment le sentiment linguistique , c'est l'instinct qui nous permet d'identifier sans réfléchir les fautes de grammaire dans notre langue maternelle. Donc de ne pas les commettre. Les journalistes semblent souvent très peu sentimentaux sur ce plan-là... Au point d'utiliser, pour certains d'entre eux, le futur après si . Ce qui donne par exemple [ dans Le Progrès de Lyon ] cette tournure que l'on croirait tout juste digne d'un enfant en très bas âge : " Si la construction sera abandonnée " (sic). En anglais, when ( quand ) est suivi du présent pour exprimer le futur : " when I am 64" [The Beatles] signifiant "quand j'aurai 64 ans ". En français, c'est la conjonction si qui est suivie du présent pour exprimer une éventualité future : il faut dire " si vous venez, j'en serai ravi ", et non " si vous viendrez, j'en serai ravi ". On s'étonne de devoir le

en termes de

Comme il n'y a pas le moindre mot anglais, ni aucune rime en -ing , peu de gens entendent un anglicisme assourdissant dans l'expression " en termes de ". C'est pourtant du pur anglais ( in terms of ) traduit mot-à-mot et à la va-comme-j'te-pousse par des professionnels négligents œuvrant dans le monde de la presse, de l'édition, de la traduction bien sûr, et des affaires. Mais les affaires internationales et le marketing, ce qui les a rendus très désireux de parler pour le restant de leurs jours comme ils ont entendu le faire à Wall Street durant leur stage de quatre semaines aux USA. Cette entrée en contrebande de in terms of dans le français courant s'est produite peu avant la fin du vingtième siècle. Depuis, la tache s'incruste dans le tissu des raffinements langagiers qui drape nos discours et nous les rend seyants. Mais que signifie réellement " en termes de " dans toute autre langue que son habituel franglais ? En français, en terme

comment dénommer le nommage

En juin 2010* est paru un Guide pratique de la dématérialisation des marchés publics , proposé par la Direction des affaires juridiques du ministère français de l'Économie , de l'Industrie et de l'Emploi . Au glossaire de ce guide, la Mission linguistique francophone a relevé la présence importune de trois barbarismes. Le premier de ces barbarismes est le " nommage " (sic). Rappelons succinctement pourquoi il convient de faire barrage à la promotion de ce terme, et pourquoi il semble nécessaire de veiller à son éviction des textes réglementaires francophones, plutôt que de les voir répertoriés par un de nos ministères. Nommage est une récente et inculte traduction - même pas mot à mot, mais syllabe à syllabe - de l'anglais naming . En français, l'action de donner un nom n'est pas "le nommage " (sic) et n'a aucun besoin de l'être, ni en informatique ni ailleurs. Selon le contexte et la nature exacte de l'action de nommer, le

crime organisé

La mauvaise traduction mot à mot de l'anglais  organized crime a donné "le crime organisé". Ce qui désigne en réalité le banditisme, le grand banditisme,  la grande délinquance,  la pègre, le milieu, la mafia (au sens propre ou par extension). Car un "crime organisé", en français, c'est un crime avec préméditation. Et non une organisation criminelle ni ses activités. Il faut savoir que l'anglais crime dénomme indistinctement ce que nous appelons des crimes , des délits et même certaines infractions . Ainsi le proxénétisme et le tapage nocturne sont-ils respectivement un délit et une infraction . Mais en anglais, ce sont l'un et l'autre des crimes . L'expression " crime organisé " est donc doublement inadéquate. Elle a été introduite dans notre langue par des journalistes expéditifs qui, pompant leurs articles sur la presse anglophone, se sont laissés piéger par la facilité et le manque de discernement. Elle a ensuite été r

alerte au "géocaching" !

Un néologisme véritablement monstrueux [NDE : nous sommes avares de ce genre de qualificatifs, mais ici il s'impose ] déboule dans nos oreilles et sous nos yeux : le géocaching (sic). Aïe, aïe, aïe, que d'ignorance condensée en si peu de lettres... Il s'agit de ce qu'on appelait jusqu'à présent une chasse au trésor, une course d'orientation ou un rallye. La seule nouveauté supposée étant l'usage de la boussole GPS de son téléphone portable au lieu d'une boussole magnétique à l'ancienne. Cette évolution technique n'appelle pas de terme nouveau, pas plus que la navigation n'a changé de nom en passant de la voile latine au moteur hors-bord, et pas plus que la gloutonnerie n'a besoin de changer de nom selon qu'elle se rassasie à la fourchette, à la baguette ou avec les doigts. L'honorable amusement consistant à retrouver des objets cachés dans la nature se voit depuis peu dénommé par le terme précité, lequel est d'une co

pénurie de personnel sur moi

Au journal télévisé de France 2, un reportage nous présente une adolescente hospitalisée en chirurgie, invitée à témoigner de la pénurie de personnel hospitalier , selon l'expression juste et même très avertie qu'elle emploie. Ce syntagme semble la récitation d'un propos tenu devant elle avant que le micro lui soit tendu. Pour témoigner de cette pénurie, elle nous dit ensuite avec plus de spontanéité : " Je viens là depuis huit ans. Avant, il y a avait plus de monde sur moi ". On sait que l'usage abusif du petit mot " sur " a rongé notre langue. Ici, " sur moi " signifie " pour s'occuper de moi ". La préposition sur , qui remplace déjà une quinzaine d'autres prépositions, commence donc à remplacer un verbe et sa préposition. Il n'y a là ni évolution réjouissante ni émancipation éclairée mais affligeante dénaturation du sens. Ce n'est pas de la faute de l'adolescente : elle parle la langue des adultes médiatisé

"en live"

L'expression " en live " (sic) n'est ni anglaise ni française : elle viole les deux langues et fait honte aux professionnels du spectacle et des médias qui s'adonnent à ces viols. Dans le français courant, le mot  live  est emprunté à l'anglais dans son acception adverbiale qui signifie exactement " en public " ou " en direct ". Dès lors, le franglais " en live " signifie " en en-public " ou " en en-direct ". Chacun devrait entendre instinctivement que l'ajout de la préposition " en " devant l'adverbe " live " produit un bégaiement sémantique inepte. L'expression " en sans contact " (sic) est une semblable aberration syntaxique, construite sur le même modèle défectueux : l'ajout fautif de la préposition en devant un adverbe. Maquillé de guillemets ou non [cf. annonce BNP Paribas ci-dessus], c'est un monstre rédactionnel. On se demande pourquoi le prés

danger et dangerosité

Un officier de police soucieux de parler savamment à la télévision explique que les scooters " présentent une dangerosité pour les piétons ". Il ne sait plus que le mot juste, même pour parler savamment, est danger : si les scooters sont dangereux, alors ils présentent un danger, pas une "dangerosité". La pataude "dangerosité" n'a aucun besoin d'exister puisqu'elle signifie exactement la même chose que le danger : la dangerosité est définie, par les professionnels qui ont adopté ce terme tarabiscoté, comme le fait d'être dangereux. C'est donc bien le danger. Car est dangereux ce qui constitue un danger. C'est même une lapalissade. Avec deux fois et demi plus de syllabes que le danger (cinq au lieu de deux), la "dangerosité" est aussi inutilement hypertrophiée que l'est une   fonctionnalité au lieu d'une   fonction . Perte de repères navrante mais sans autre danger (et non "sans autre dangerosité&qu

susceptible et vexatile

Une personne qui se vexe facilement est une personne susceptible . Mais, comme le mot vexer ne présente aucune similitude d'aspect avec le mot susceptible , certains locuteurs francophones ne font pas le lien entre les deux termes et disent d'une telle personne qu'elle est " vexable ". Plutôt que cette fabrication maladroite, la Mission linguistique francophone leur propose l'adoption du néologisme vexatile : " Robert est trop vexatile, ça devient saoulan t". Ce mot est formé sur le modèle de versatile (qui change facilement d'humeur, d'opinion, d'état), docile (qui se montre doux devant l'autorité), ductile (qui possède la propriété de s'étirer), gracile (qui possède une grâce fragile), etc. La surabondance actuelle et passée d'adjectifs formés au moyen du suffixe -able ne doit pas faire oublier que la langue française est riche d'autres désinences . Ici, la similitude entre fragile , versatile et vexatile

chargés d'être en charge

Une expression française anodine est en train de disparaître : être chargé de (telle ou telle responsabilité professionnelle, associative, élective, etc). Elle est trop souvent remplacée par cette tournure fautive : " être en charge de " (sic). Il existe bien encore des Chargés de mission , dont la fonction tire son nom du fait qu'ils soient chargés d'une mission. Mais, oublieux d'une étymologie aussi limpide, ils se présentent le plus souvent aujourd'hui comme étant " en charge de " leur mission. Cette erreur s'est installée en français dans le milieu des années 1990 et n'en repart plus. Une fois encore, il s'agit d'une mauvaise traduction mot à mot de l'anglais " to be in charge of " qui signifie " être chargé de ". Elle s'est infiltrée sans que les défenses immunitaires de notre langue vivante aient joué leur rôle : rédacteurs en chef et secrétaires de rédaction qui ne corrigent pas un titre, un

suite à : une fièvre contagieuse

" Suite à " n'est pas français . C'est même du très mauvais français. Cette locution dérisoire est pourtant propagée désormais en France et en Belgique par les médias et les administrations avec le plus grand sérieux. Et la plus navrante obstination. Initialement, l'expression '' suite à' ' n'était employée que par des plaisantins, au même titre que " rapport à ", pour singer la langue administrative ou militaire malhabile, dans des phrases comme celle-ci : " Mon adjudant, j'voudrais vous causer suite à ma désertion pour vous donner des explications rapport à l'invasion subie subitement ". On voit bien que la construction des locutions '' suite à '' et '' rapport à '' est absolument défectueuse, puisque le complément de nom doit se construire avec la préposition de et non la préposition à (il convient de dire " le père de Louis " et non " le père à Louis " ; d

save the date : l'anglomanie parfaite

  L'anglomanie s'exprime par l'abus de termes anglophones ou « anglomorphes », c'est-à-dire d'apparence anglaise. L'anglomanie s'épanouit dans la tendance à employer des termes anglais bien que leur traduction française existe parfaitement. Elle culmine dans le recours à des termes inexistants dans la langue anglaise mais qui semblent lui avoir été empruntés (par exemple, le «  pressing  » cher aux commentateurs sportifs, employé par erreur à la place de l'anglais pressure , dont la formulation correcte en français est pression ). Plus insidieusement, l'anglomanie s'infiltre dans la tendance récente des Francophones à généraliser des constructions grammaticales contraires à la syntaxe du français mais conformes à la syntaxe de l'anglais (par exemple, en construisant le complément de nom par juxtaposition : « logement étudiant » au lieu de : « logement d' étudiant » ; « structure bois » au lieu de « structure en bois »).

dataroom et meet-up au Grand Paris

L'établissement public de la Métropole du grand Paris s'est doté d'un site internet dont les intitulés vomissent la langue française avec une âpreté désolante. Jugez plutôt ce que la capitale élargie du monde francophone vous donne à lire comme titres de rubriques dans sa version française : dataroom, meet-up, agenda . Agenda peut sembler irréprochable, si ce n'est que le mot est ici utilisé dans l'acception anglophone du terme. Ce n'est pas le petit carnet que l'on promène sur soi pour y noter ses rendez-vous (ce qui est l'unique sens de du mot agenda en français). C'est the agenda : le programme des activités à venir, l'ordre du jour, la liste des points à aborder. Mais on pourrait ne rien trouver à redire à cette métonymie [ métonymie = boire un verre au lieu de boire le contenu d'un verre ] si elle ne venait pas corroborer le constat d'un snobisme anglomane omniprésent par ailleurs. Car avec meet-up et dataroom , l'ambig

vigueur et vanité du franglais

Juste un mot sur le recours persistant aux anglicismes intempestifs dans les textes et conversations en français (manie qu'on qualifie depuis les années 1950 de  franglais . Un modeste aphorisme assumé en nom propre* : Dire les choses en anglais ne les rend ni plus actuelles ni plus efficaces ni plus parlantes. C'est au contraire le signe d'un suivisme ébloui par l'obscurité. * Frédéric Allinne (anglophile de toujours et lexicographe enthousiaste de la langue anglaise).

comment dire non

Non est notre adverbe de négation. Sa prononciation est bien connue : non, c'est "non" ! Pourtant, cette sonorité est déformée par de nombreux professionnels francophones de la parole qui croient devoir dissocier les deux lettres O+N de non dans certaines circonstances. C'est l'erreur que l'on entend par exemple dans la lecture de " non identifié " ou " non européenne " lorsque ces expressions sont prononcées "nonne européenne" et "nonne identifiée". Quels que soient nos accents nationaux ou régionaux (qui sont ici une considération hors-sujet comme nous allons le voir plus loin), la seule prononciation correcte de  non identifié  ou  non européenne  est celle qui ne modifie pas le moins du monde la prononciation du phonème traduit par les lettres O+N dans non , tout en respectant la liaison obligatoire du N devant un mot commençant par une voyelle. La prononciation sans faute est donc celle que l'on pe

hubs et clusters au Grand Paris

Dans les messages publics de l'établissement public de la Métropole du grand Paris, nous ne sommes pas seulement orientés à contre-sens vers la dataroom et le meet-up , il est aussi question de hubs , de clusters , de coworking , de tout ce qui se fait de plus exaspérant comme jargon irréfléchi et suiviste chez les tenants du style m'as-tu-vu-sortir-de-mon-école-de-management. Les constructions grammaticales autour de ces anglicismes forcenés achèvent de saccager notre langue : " ce document sera mis sur la dataroom ", nous informe-t-on. Comprenne qui pourra. Une " (data) room " étant une salle (de données), on ne saurait placer quoi que ce soit "sur" une dataroom mais peut-être dans la salle en question ? Ne cherchons pas la petite bête, ne soyons suspects ni de purisme ni de passéisme : à l'heure où l'on se targue d'habiter "sur Paris" (quelle envergure il faut pour cela, pour habiter SUR une ville !) au lieu d

défense et attaque de Didier D., orateur footballistique

En France, une émission satirique de la télévision [ Le Petit Journal ] se délecte de railler la diction d'un dirigeant du football de ce pays, M. Didier Deschamps, qui serait coutumier de ne pas prononcer correctement la lettre X et de la remplacer par le phonème S : un homme d' espérience au lieu d' expérience . Chez l'intéressé, cette élision du son x relève d'un accent régional. Cela ne prête donc pas à la critique acerbe, contrairement à la prononciation ignare de " archet " comme " archer ", selon une désaffection pour la justesse des voyelles qui conduit des cohortes de professionnels de la diction sans le moindre accent régional pittoresque à nous dire " elle voulez " au lieu de " elle voulait ", ou à nous parler de la cote au lieu de la côte et inversement. Ce qui est beaucoup plus désolant dans le discours du locuteur que nous venons de défendre pour sa diction, c'est le massacre de la syntaxe qu'il p

fuiter : un cas d'inceste barbare

Non, un homme politique ne laisse pas " fuiter " une information dans la presse. Il la laisse échapper , il la laisse filtrer , parfois même il la distille ou il la divulgue . Quand un parent et son enfant font ensemble un autre enfant, cela procède de l'inceste. Le résultat n'est pas toujours heureux. Il existe des incestes dans la famille des mots, et les anomalies génétiques n'y sont pas moins affligeantes. Par exemple : le verbe FUIR engendre le substantif FUITE . Quand des journalistes accouplent le parent FUIR et son enfant FUITE , ils enfantent sans vergogne le verbe FUITER (sic), dont le caractère dégénéré n'échappe qu'à eux...  La Mission linguistique francophone s'est émue de cette monstruosité sémantique dès son apparition publique, en janvier 2008 . Quatre ans plus tard, le 2 février 2012 , l' Académie française nous a suivis et a insisté pour que les journalistes chassent de leur esprit le barbarisme fuiter (sic), l

Eurovision : la décideuse qui se flatte d'avoir rendu la francophonie aphone

Les responsables de divertissements télévisuels de 24 pays d'Europe sur 26 ont choisi, pour le concours de l' Eurovision 2016 , des chansons anglophones ou pseudo-anglophones ou en partie anglophones - comme si le charme notoire de l'italien, ne se suffisait pas à lui-même, non plus que celui du russe, du polonais, de l'arménien ou du grec. De trois choses l'une : • soit toutes les langues d'Europe autres que l'anglais et le pseudo-anglais doivent être reconnues comme langues mortes, y compris le français qui ne fut chanté de bout en bout que par une Autrichienne, laissé pour morte par le jury de professionnels, puis ranimée par le vote du public - nous y reviendrons ; • soit les responsables des divertissements télévisuels des pays non anglophones sont des incompétents dotés de responsabilités qui les dépassent du tout au tout, à commencer par celle de faire vivre leur langue ; • soit le concours de chanson de l'Eurovision s'est mué en u

sérendipité : fortuité

En anglais, on appelle serendipity le fait d'effectuer une découverte inespérée. On cherchait quelque chose, on en trouve une autre. Et cette autre chose s'avère plus importante, plus précieuse, plus fructueuse. Internet est un lieu de recherches propice à de telles trouvailles. Inventé par Horace Walpole [ ci-contre portraituré par Ramsay, et ci-devant Comte d'Oxford ] en 1754, le mot serendipity a été importé par certains dans notre langue sous sa forme francisée sérendipité . Un peu pédant, très obscur, ce néologisme n'a pas eu grand succès dans le langage courant. Des Canadiens francophones lui ont récemment (vers 2000) trouvé un substitut autrement plus savoureux : la fortuité . Plus concis que la sérendipité [trois syllabes au lieu de cinq], plus euphonique et plus lumineux, le mot fortuité est immédiatement compréhensible. En prime, il agrandit à point nommé la petite famille déjà composée du couple fortuit et fortuitement , qui l'ad

être candidat ou postuler

Adopté depuis quelques années par certains jargons professionnels, le verbe " candidater " est né des amours banales du snobisme et de la paresse. Le snobisme qui pousse à parler de façon pseudo-compétente, même au prix d'un lourd barbarisme. Et la paresse de retrouver dans sa tête puis d'articuler l'une des expressions correctes pour exprimer cette action, à savoir : postuler, être candidat , se porter candidat , faire acte de candidature ou se présenter (à un examen, un concours d'entrée, une élection) voire s'inscrire (à un tirage au sort, un concours, sur une liste de prétendants à une fonction, une distinction, une invitation gratuite, etc) ou encore briguer . On note que le verbe postuler ne comporte que trois syllabes, contre quatre pour le verbe candidater . Il ne s'agit donc pas ici d'une paresse des muscles de l'articulation, comme souvent, mais de la paresse intellectuelle qui empêche de faire le lien entre la notion de post

métropoles : villes mères

Les métropoles [du grec "ville mère"] sont par définition de très grandes villes - ou même des territoires nationaux presque entiers, comme dans le cas de la France continentale par distinction avec ses régions insulaires. Mais alors, que sont les grandes métropoles chères à la plume des dircoms de diverses capitales régionales françaises? Ce sont à l'évidence de grandes très-grandes-villes . Et si Nancy , Nantes , Marseille , revendiquent d'être de "grandes métropoles", que sont Londres, Mexico, Tokyo ou Los Angeles ? Un Chef de cabinet à qui nous avons posé la question a trouvé la réponse et n'a pas hésité nous à l'écrire sans bien se relire : ce sont de très grandes métropoles .* Bonne mère, où l'escalade verbale des métropoles s'arrêtera-t-elle ? Et la dévaluation des superlatifs ? * Réponse fausse : ce sont des mégapoles [du grec "grande ville"], des villes dont la population frise ou dépasse les dix millions d'habit

listing, naming, pressing

Académie française (12 juillet 2016) : " On rappellera qu’appeler listing une liste n’améliore en rien la qualité ou la valeur de cette dernière, sauf à penser que l’emploi d’anglicismes, fussent-ils de mauvais aloi, est une marque de modernité . " Et toc. Il en va de même pour le ridicule bedding , cher à quelques professionnels de l'ameublement et du snobisme, qui désignent ainsi la literie . Même pichenette pour se débarrasser du grotesque naming , jargon riche en poudre aux yeux et empoisonnée par une anglomanie de carnaval, supposé exprimer l'action de donner un nom ou d'inventer un nom avec beaucoup de flair commercial. Ce qui s'appelle en français la dénomination , l' appellation ou la création de marque . Enfin, même coup pied au derrière des commentateurs sportifs adeptes de l'inepte pressing , qu'ils croient voir exercé par une équipe affrontant une autre. Il s'agit peu probablement de blanchisserie et sans doute d'exerce

note sur les memos et les focus

La Mission linguistique francophone [M•L•F•] ne manifeste aucune aversion pour la langue anglaise, bien au contraire. C'est ce qui la distingue d'autres organisations dites " de défense de la langue française ". Dans sa tâche permanente d'observation des coups portés à la langue française par les professionnels francophones de la communication, la M•L•F• ne s'emploie qu'à dépister les atteintes morbides (1) au vocabulaire et à la syntaxe de notre langue, celles qui lui occasionnent des pertes de sens, de substance ou de cohérence : lorsque le vocabulaire ou la syntaxe d'une autre langue font insidieusement irruption dans la nôtre, par ignorance, par incompétence, par snobisme, par suivisme, par corporatisme parfois, et non par choix créatif ou stylistique. La Mission linguistique francophone ne s'autorise à émettre aucune objection à la libre anglophilie, voire anglomanie, de certains auteurs ou locuteurs francophones. Elle ne mène ni ce